Introduction à la littératie

La littératie (anc. littérisme, août 2005), ou éducation à l'information, correspond à l'anglais information literacy (IL) ou digital literacy. À côté des compétences traditionnelles lire/écrire/compter, l'“apprendre à apprendre” [Endrizzi, 2006] développe des compétences nouvelles : problématiser, chercher, évaluer, utiliser et produire de l'information.

La littératie est née dans les bibliothèques [ALA, 1989] et interpelle la communauté éducative avec le Programme Information pour tous de l'Unesco [Unesco, 2006] en plaçant le dévelopement de l'information vivante dans ses priorités. Ce transformation est marquée par le passage d'une culture de la recherche documentaire à la culture informationnelle qui inclue de multiples savoir-faire techniques, cognitifs, personnels ou collaboratifs, et de médias (textes, images, vidéos…).

• exemples sur Savoirs CDI
• projets européens : Deux plates-formes multilingues de formation à la recherche d’informations sont réalisées, dans le cadre des projets CHILIAS (Children’s Library – Information – Animation – Skills, 1994-1998) pour les 9-12 ans et VERITY (Virtual and Electronic Resources for Information Skills Training for Young People, fin en 2000) pour les 13-19 ans.

• neuf questions de Marland et Irving (Royaume-Uni, 1979), l’Information Search Process de Kuhlthau (États-Unis, 1982), les Big Six Skills d’Eisenberg et Berkowitz (États Unis, 1988), le modèle PLUS de Herring (Royaume-Uni, 1996) le research cycle de Jamie McKenzie (1999, Australie) et les seven pillars du SCONUL (Royaume-Uni, 1999). Pour une vue détaillée et comparative de ces modèles, on pourra consulter le site franco-québécois Formanet.
• l'évolution vise à associer compétences procédurales et compétences cognitives. Les démarches de type « inquiry learning », « problem-based learning », ou bien « information problem solving » font désormais l’objet de modélisation, comme par exemple les « big6 skills » d’Eisenberg et Berkowitz, les « webquests » de Bernie Dodge ou bien encore le « Guided inquiry » de Kuhlthau et Todd. (cf. It’s all about getting’A’s, 2006).

Le focus sur les ressources ou Resource based learning s'organise en deux tendances :

• diversité des modes de recherche (moteurs, recherche plein texte, outils de navigation sociale)
• démarche de type « résolution de problèmes », avec en amont une prise en compte du savoir de l’élève et en aval la création de connaissances.

2005, A. Serres, Moteurs de recherche et maîtrise de l’information : faut-il former à Google et comment ?
2004, Loïc Le Roux, Pratiques, réseaux et territoires : les professeurs-documentalistes aux confluences des mutations
2004, Loïc Le Roux, Circulation de l’information et « navigation communautaire » chez les enseignants-documentalistes

La mise en oeuvre de stratégies communautaires de veille peuvent pondérer l'usage systématique de google par les documentalistes et les élèves.

• littératie : « l’aptitude à comprendre et à utiliser l’information écrite dans la vie courante, à la maison, au travail et dans la collectivité en vue d’atteindre des buts personnels et d’étendre ses connaissances et ses capacités » (OCDE et Statistiques Canada en 1995).
• après l’acception première centrée sur l’usage documentaire (« library literacy » ou « library instruction »), les termes « computer literacy », « technology literacy », « visual literacy », « media literacy » ou bien encore « digital literacy » sont également utilisés
• « centre d’information et documentation » (CDI) et « professeurs documentalistes » en France, « learning resource centre » (LRC) ou « open learning centre » (OLC) et « LRC, OLC manager » au Royaume-Uni, « learning media center » et « learning media specialist » aux États-Unis, « school library » et « teacher-librarian » au Canada
• « new literacies » ou « multiliteracies » ou « multiple literacies » – et son équivalent francophone « littératies multiples » (Canada) – ou bien encore « 21st century literacies » aux États-Unis
• éducation aux médias, « media literacy »
• concept hybride associant « media & information literacy » ou bien encore « information and digital literacies »
• « multicultural literacy », de « critical literacy », de « knowledge management » et de « lifelong learning »
• Curiosité et créativité, d’une part, et auto-efficacité, d’autre part, sont également considérées comme des attributs essentiels de l’EI (INRP) : adaptation aux contextes, constructions de stratégies pour la résolution de problèmes

• défi non seulement pour la réussite scolaire mais aussi pour la réussite professionnelle et l’exercice de la citoyenneté
• refonte du système éducatif (New Literacies: Changing Knowledge and Classroom Learning (2003), Colin Lankshear et Michele Knobel), Douglas Kellner (Technological transformation, multiple literacies and the re-visioning of education, 2004)
• refondation du système éducatif et de promotion des compétences de communication, de création et d’action, définissant l’élève comme un sujet actif et engagé (Kellner qui relie Paulo Freire, d’Ivan Illitch et de John Dewey)
• nouvelles stratégies d’apprentissage, basées sur une construction sociale collective plutôt que sur le savoir transmis par l’enseignant dont le rôle devient une orchestration des opportunités d’apprentissage (Donald Leu, Charles Kinzer, Julie Coiro et Dana Cammack, dans leur article « Toward a theory of new literacies emerging from the internet and other information and communication technologies » (2004))

• déficit d’image de la mission pédagogique du bibliothécaire
• Administrateurs et enseignants ont de surcroît une connaissance très approximative du concept d’éducation à l’information, et n’établissent pas de relation entre l’EI et le bibliothécaire.
• forte disparité entre la structuration progressive réelle de la fonction pédagogique des bibliothèques et la méconnaissance de cette fonction par l’ensemble des acteurs éducatifs. Cf. Penny Moore (An analysis of Information Literacy education worldwide, 2002).
• focus généralisé sur des approches limitées à l’exploitation de ressources documentaires, à travers des activités modulaires, dans le meilleur des cas.
• hésitation pour orienter la formation documentaire vers la formation aux TIC, ou vers des stratégies cognitives favorisant l’apprentissage autonome
• difficulté à articuler des enseignements disciplinaires
• difficultés d’implémentation dans des systèmes scolaires organisés pour distribuer des enseignements et non pour promouvoir les apprentissages
• difficultés de trouver un continuum pédagogique entre le secondaire et le supérieur, cf. [Information Literacy Skills: the link between tertiary and secondary education] et [Building a Foundation for Collaboration: K-20 Partnerships in Information Literacy (2005)].
• construction d’indicateurs pour évaluer les activités de la bibliothèque et, corrélativement, celles du bibliothécaire, et aussi pour mesurer les relations entre les services offerts et l’apprentissage
• Études d’impact de la bibliothèque sur la réussite scolaire
• coopération inter-établissements comme enjeu de lecture publique
• The barrier to learning to read is the lack of textbooks and novels while the barrier to learning IML is the lack of technology access.

• Allemagne, Pays-Bas : focus porte sur les TIC ; concept d’« information and computer literacy » (ICL).
• Suède et pays scandinaves : au départ, usage de la bibliothèque et sur la production de matériel pédagogique propre, avant de promouvoir une articulation plus forte entre enseignants et bibliothécaires dans une approche centrée sur la résolution de problèmes
• Espagne : l’« educación documental », apparue en 1992 dans les programmes, favorise la production de matériel pédagogique et le partage d’expériences autour de projets liés au TIC.

Les bibliothèques sont soutenues historiquement soit par :

• les pouvoirs publics, qui encouragent alors la collaboration bibliothèque / enseignant : Angleterre, Australie, Canada, États-Unis, France et Québec…
• des initiatives locales, ce qui implique alors une large réflexion sur les compétences liées à l’usage des TIC : Belgique, Italie, Espagne et Allemagne

En France, le B2I est introduit en 2000 (il inspire les modèles polonais et belge). Il évalue la maîtrise des compétences dans l’usage des TIC, qui s’inscrit dans une approche transversale, distincte de tout enseignement spécifique. Cependant :

• ce déploiement reste majoritairement pris en charge par les enseignants de technologie et ne suscite pas de dynamique particulière au niveau de l’établissement, tant en matière d’équipement que d’innovation pédagogique disciplinaire et/ou pluridisciplinaire.
• la mobilisation des corps d’inspection et des académies, très inégale selon les régions, n’a pas l’impact espéré sur la coordination des actions et sur le suivi de l’élève, en particulier dans la transition entre l’école primaire et le collège.

• partisans d’une approche normative, avec l’introduction de l’EI dans les curricula : conception instrumentale segmentée en information skills ;
• défenseurs d’une approche transversale non curriculaire, appuyée plutôt sur les enseignements disciplinaires : conception globale privilégiant les processus cognitifs : information literacy.

• les bibliothécaires font parti du corps enseignant depuis la création du CAPES en 1989
• ce qui suppose que la documentation est une discipline scolaire [Céline Duarte-Cholat dans son article De la professionnalisation des documentalistes vers une discipline d’enseignement (2002)]

Cf. [Yves le Coadic]

[Muriel Frisch dans son ouvrage Évolutions de la documentation et naissance d’une discipline scolaire (2003, cf. note de lecture).], exigences :

• formaliser un curriculum ;
• planifier des actions de formation respectant une progression ;
• partenariat systématique avec les enseignants disciplinaires ;
• enseignement théorique spécifique ;
• construire des outils d’évaluation propres à une science de l’information.

En France, malgré le privilège d'une approche pluridisciplinaire dans les textes officiels : [Perspectives sur l’éducation à l’information (2003), Paulette Bernhard]

“cette « identité d’enseignant » n’est qu’une composante de l’identité du bibliothécaire scolaire, et que cette « tentation de la disciplinarisation » risquerait d’introduire un déséquilibre préjudiciable à ses autres fonctions de professionnel de l’information et de gestionnaire-planificateur.”

[Jo Webb et Chris Powis (Start with the learner, 2005) ]

• stérilité d’une inscription de l’EI dans les programmes scolaires à l’exclusion d’une approche globale
• diversité des styles d’apprentissage
• activités pédagogiques ouvertes et pertinentes par rapport aux programmes
• recentrage sur les besoins et attentes des élèves

Cf. [CILIP dans un rapport publié en 2002, Start with the child].

• offrir un environnement à la fois riche en ressources et flexible pour permettre de concilier activités individuelles et activités collectives, avec du personnel ouvert et disponible.
• associer les élèves à la gestion de la bibliothèque
• meilleure prise en compte de l’environnement de proximité
• politique de vulgarisation des résultats de la recherche, susceptible d’encourager la pratique réflexive et l’intégration des compétences informationnelles (Teachers’use of research information : information literacy, access and attitudes).
• l’engagement du chef d’établissement dans la mise en oeuvre d’une politique autour des compétences informationnelles s’avère d’une importance cruciale
• l’identité du bibliothécaire ne peut être appréhendée que dans sa multiplicité, c'est-à-dire dans la conjugaison de ses rôles d’enseignant, de professionnel de la documentation et de gestionnaire-planificateur
• flexibilité conjointe des horaires d’ouverture et de l’accès aux ressources
• conception élargie de l’espace informationnel (« learning resource centre », « open learning centre » au Royaume-Uni, et « learning media center » aux États-Unis), l’apprentissage s’articule autour d’opportunités formelles et informelles, impliquant des approches à la fois collectives et individuelles

• projet DigEuLit, financé par la Commission Européenne : le groupe apportera sa contribution à l’élaboration d’un European Framework for Digital Literacy (EFDL) d’ici la fin de l’année 2006 (voir le progress report).
• projets PISA et TIMSS pour les jeunes, IALS pour les adultes : évaluation du degré de littératie par l'Unicef, 1994-2000
• projets de collaboration entre bibliothécaires et enseignants : programme Profil of learning (POL) lancé en 1998 dans l’état du Minnesota et celui des travaux personnels encadrés (TPE) en France depuis 1999 (résultats contrastés), les études d’impact de l’EPPI en Angleterre
• encourager la pratique réflexive et l’intégration des compétences informationnelles (Teachers’use of research information : information literacy, access and attitudes).

Rôle : informer les gouvernements des applications pédagogiques :

• National forum on information literacy (NFIL, 1989) et l’Institute for Information Literacy (IIL, 1998) aux États-Unis ; l’Australian and New Zealand Institute for Information Literacy (ANZIIL, 2001) en Australie et Nouvelle Zélande ; le SCONUL Working group on information literacy et, plus marginalement, le National Literacy Trust (NLT, 1993) au Royaume-Uni et le NORDINFOlit dans les pays scandinaves.

2006 : Programme information pour tous le l'Unesco
2006 mars : Rapport final du congrès d'Alexandrie : favoriser le déploiement de la littératie dans la formation
http://www.ifla.org/III/wsis/AlexandriaManifesto-fr.html : rôle des bibliothèques pour lutter contre la fracture numérique
2005 : Programmation d'Alexandrie
2003 septembre : Déclaration de Prague
1989: impulsion de la literacy par l'ALPA

2006, ENDRIZZI Laure, INRP, Éducation à l’information, Lettre d'information n° 17 – avril, en ligne
2006, Unesco, Programme Information Pour Tous, en ligne
2006, Unesco, Living Information, en ligne
1989, American Library Association (ALA), Whitepaper of Presidential Committee on Information Literacy, en ligne

Histoire de la littératie :
2003, Virkus Sirje, Information literacy in Europe: a literature review, en ligne
2005, Armstrong Chris et al., Defining information literacy for the UK, en ligne
rapport de Penny Moore, An analysis of Information Literacy education worldwide pour l’Unesco et le National Forum on Information Literacy (2002);
rapport Results That Matter: 21st Century Skills and High School Reform (2006).

Penny Moore (An analysis of Information Literacy education worldwide, 2002).

Recherche d'information :
Paulette Bernhard, (Apprendre à « maîtriser » l’information : des habiletés indispensables dans une « société du savoir », 1998)

Rôle pédagogique des bibliothèques et apprentissage des compétences informationnelles

• Unesco et l’IFLA (international federation of library associations and institutions) posent les fondements du rôle pédagogique des bibliothèques scolaires : le School library manifesto (1999), complété en 2002 par un ensemble de recommandations en matière de ressources, de personnels, d’activités et de promotion : School libraries guidelines (cf. version française).
• les documents publiés par l’American association of school librarians dans le cadre du programme de recherche Information Power, et notamment l’ouvrage Information Power: Building Partnerships for Learning (1998) et le référentiel Standards for Initial Programs for School Library Media Specialist Preparation (2003) ;
• le référentiel canadien Students’Information Literacy Needs in the 21st Century: Competencies for Teacher-Librarians, publié conjointement par l’Association for teacher librarianship in Canada et la Canadian school library association en 1997 ;
• les guides publiés par le CILIP au Royaume Uni : Primary school library guidelines (2002) ; CILIP guidelines for secondary school libraries (2004) ; les normes du DFES Key stage 3 and the library ; la campagne officielle d’information sur le rôle des bibliothèques scolaires : School libraries making a difference ;
• l’ensemble des textes réglementaires français sur la mission des professeurs documentalistes.

Blog

• écrans de veille en éducation

B2I:
Dossier du Café Pédagogique, Le B2I en 2004. Enquêtes et analyses, réalisé par Bruno Devauchelle.
Régine Gentil et Jean-François Lévy, dans leur rapport Le fonctionnement du brevet informatique et internet au collège (2005),
B2I

Cf. aussi la bibliographie VST-INRP sur wikindx éducation à l'information, 59 références sur 2006-2008. D'autres mot-clés sont disponibles, comme écriture (62 références). Un moteur de recherche interne est disponible.

BERNHARD Paulette, EBSI, Montréal
Unesco, unicef
Le Coadic Yves, IUFM de Nantes
Textes français légiférant le métier de professeur documentaliste
Revue Esquisse IUFM d'Aquitaine, juin-août 2003